Remettons les choses en perspective: Materazzi a une réputation de TRES mauvais garçon (et pour des raisons qui ne sont pas forcement inventées). Il est dans l’équipe comme second choix, derrière Nesta, qui est déclaré non disponible pour jouer la finale, comme les demis et les quarts auparavant. Il a déjà été expulsé pendant cette coupe du monde pour une faute sur un Australien en 1/8e de finale qui lui a valu un carton rouge direct. L’Italie a finalement gagné le match, grâce à un penalty de Totti dans les arrêts de jeu, suite à une faute pour le moins litigieuse sur Grosso dans la surface. Même les italiens ici au bureau avouent que l’Italien avait plongé. L’Italie est en plein scandale des matches truqués (un nouveau scandale après celui des paris en 1982 et du dopage il y a pas longtemps, dont Cannavaro etait un acteur principal), certains de ses joueurs pourraient être impliqués, son entraîneur a été interrogé par la justice – nombreux étaient ceux qui demandaient sa tête la veille de l’ouverture de la coupe du monde. Mais l’Italie est arrivée jusqu’en finale, en sortant d’un groupe a priori difficile. Elle a bien joué comme une équipe d’Allemagne, relativement faible il faut bien l’avouer, et se présente en favori pour la finale chez les bookies, notamment pour sa solidité défensive (1 but encaissé dans toute la compétition), son esprit de corps et son indéniable efficacité à ressortir le ballon rapidement et développer un jeu offensif dangereux en quelques touches de balle.
La France, elle, revient de loin. On aurait pu laisser notre peau dés le tour préliminaire mais on est passé, au forceps, et tout a semblé se mettre en place contre l’Espagne, grâce à quelques changements tactiques mineurs, à la naissance d’une équipe bien équilibrée et l’arrivée à point nommé des stars que l’on attendait (plus). Zidane a été bon contre l’Espagne, énorme contre le Bresil et efficace contre le Portugal. Il est encensé par tout le monde, “le meilleur joueur de foot des 20 dernières années”, l’”homme le plus cool du monde”, le “Dalai Lama du ballon rond”. Il reçoit la récompense pour le meilleur joueur du mondial. C’est son dernier match, il peut en sortir avec une réputation de dieu vivant du football, pour le reste de sa vie. En gagnant sa deuxième coupe du monde, comme seuls l’ont fait deux joueurs avant lui, Pele et Vava. Il a 34 ans, 15 ans de carrière au plus haut niveau, dont une bonne partie en Italie, il rate rarement les grands rdvs (il marque en finale en 98, il rate pas le peno contre le Portugal en demis, ou celui contre le Portugal en demis en 2000, il marque en finale de la Champions League), ça peut vraiment être l’apothéose. Même si on perd, avec panache.
Le match démarre et Zidane marque à la 7e minute. Une panenka, en finale de la coupe du monde – génial. Ca y est, il y est, au sommet. Plus qu’à gérer le match. Mais les Italiens réagissent vraiment bien, s’accrochent et Materazzi égalise sur un corner, en sautant une tête plus haut que Vieira, une performance même s’il est vraiment grand, l’Italien. L’Italie domine le reste de la première mi-temps. La deuxième mi-temps est française, on joue bien, vite, on est dangereux, on développe même un football qui serait plutôt agréable a regarder – rare pour une finale. Mais toujours 1-1 au bout des 90 minutes et on doit jouer les prolongations. La encore, on est dominateur, on a quelques occases et à la 104e minute, sur un centre de Sagnol, Zidane met une tête qui pourrait bien sceller le match mais Buffon l’arrête sur sa ligne, grâce à un formidable arrêt – le seul vrai arrêt de tout le match. 5 minutes plus tard, sur un incident de match, une altercation entre Zidane et Materazzi, qui semble commencer par un sourire de Zidane, il lui met un coup de boule dans le thorax, à celui-la même qui avait mis la tête égalisatrice. Un geste inexcusable, impardonnable? Pour les règles du football, oui, c’est carton rouge et Zidane ne le conteste pas, il sort, la tête basse. Pour la morale, je suis moins sur. Mon père me demandait, « tu mettrais un coup de boule à un client, toi? » Ma réponse: « il insulterait ma mère, menacerait ma famille et me traiterait de sale arabe sans honneur pendant deux heures avant? »
J’ai jamais joué une finale de coupe du monde, j’arrive pas à imaginer ce qui peut se passer dans la tête d’un sportif à ce moment-la. Mais je sais une chose: on fait pas plus gros, comme événement sportif planétaire. Zidane le sait, il est passe par la il y a 8 ans. Ce coup-ci, il était à 10 minutes d’entrer à pieds de géant dans la légende et boom, coup de boule. Je ne serai pas surpris de savoir que Zidane était dans un état second au moment de l’incident, que Materazzi a trouvé le bouton qui allait le faire exploser et que Zidane n’a pas pu/su contrôlé sa réaction. Il n’en a sûrement pas mesuré les conséquences avant de le faire. Pas de « je suis un exemple pour la jeunesse, la fierté de la France, celui qui peut nous faire gagner une deuxième coupe du monde », toute cette merde que les journaux nous déballent. C’est l’inconscient qui s’est exprimé, ses sentiments les plus profonds: la frustration de ne pas avoir gagné quand on le pouvait, la peur de devoir finir sur la loterie des coups de pied au but (encore que le match est pas fini, l’Italie avait marqué à la 109e et 112e en demis), l’envie de rester humain au moment de partir en faisant une grosse connerie, le profond désir de vivre pour ses convictions (maltraitées par cet enculé) quitte à mettre de coté le football, qui n’est jamais qu’un jeu et sa réputation. La coupe, on s’en fout; Zidane a sauvé son honneur. Il n’est pas un saint, il est un héros. Ce qu’il a oublié, malheureusement, c’est qu’il y avait des gens qui regardaient les images à la télé, que c’était pas juste une histoire entre lui et l’autre et qu’il allait devoir s’expliquer publiquement. Et que, au sortir, c’est lui qui va payer.
Mais je suis certain, absolument certain, que l’incident restera dans les annales du football mondial comme un acte abominable de l’italien, qui n’est absolument pas dans l’esprit du sport et que ça lui reviendra dans la gueule, à Materazzi et que ça entachera la victoire italienne à jamais. Du moins, je l’espère.
Pour finir, je voudrais, vraiment, sincèrement, que nous soyons unis derrière Zinedine. Pour qu’il sache bien que, pour nous aussi, son honneur est plus important que la coupe, sa carrière est plus importante que ce dernier geste, son talent est plus important que ses défauts et son humanité est plus importante que son excès de tempérament. Zizou, encore une fois, on t’aime, mon pote. Et on te dit merci, comme à jamais personne avant toi, comme à un membre de notre famille à tous, qui nous a illuminé, enchanté et apporté tant de joie, de fierté et une coupe du monde.
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